La Tunisie au cœur de la méditerranée: la carte à jouer avec la Chine

 La Tunisie au cœur de la méditerranée: la carte a jouer avec la chine

En prévision de la commission mixte Tuniso – Chinoise qui va avoir lieu bientôt en Tunisie, je me fais un devoir de citoyen d’apporter ma modeste contribution à ce rendez vous périodique entre deux pays qui s’apprécient depuis soixante ans, et dont les relations ont été toujours empreintes de respect mutuel, de solidarité et de convergence des points de vues au niveau multilatéral et international.

Cependant ce rendez vous de Janvier 2018, revêt a mon sens un intérêt capital pour la Tunisie d’aujourd’hui en quête de plus de prospérité et de stabilité qui ne peuvent être garanties que par une relance économique garante d’une paix et d’une justice sociale.

C’est également un rendez-vous important pour consolider nos acquis par le passée avec l’empire du milieu et confirmer à nos amis chinois notre volonté de hisser nos relations bilatérale à un palier supérieur de sorte qu’elles soient a la hauteur des aspirations des deux peuples pour plus de progrès et davantage de prospérité.

Je ne m’étalerai pas longtemps sur la Chine d’aujourd’hui, sur sa réelle puissance économique, sur son projet politique, et sur ses objectifs à court et moyen terme ni sur son degré de nuisance ou encore moins  son caractère prédateur – ce qualificatif – que j’avais coutume d’entendre dans de nombreux salons et chancelleries occidentales depuis plus de dix ans.

  • oui , la Chine est en passe de devenir la première puissance économique et commerciale et entend bien le confirmer d’ici 2025.
  • oui ,la Chine a un projet politique aux contours peut être encore mal défini, mais qui se trouve essentiellement orienté vers la garantie de son unité territoriale et politique, et la garantie de sa sécurité en attendant de jouer un rôle plus volontariste dans les affaires de ce monde.
  • oui, la Chine peut avoir un certain degré de nuisance, si on ne tient pas compte de ses atouts si elle n’est pas considérée comme un vrai partenaire, si elle est exclue des questions de ce monde.
  • oui, la Chine peut paraître un état prédateur parce que ses besoins sont en perpétuelle augmentation. Une exponentielle difficile à satisfaire mais nécessaire en besoins énergétiques alimentaires et autres ressources naturelles .
  • oui, la Chine c’est tout cela mais en plus elle est devenue incontournable pour l’économie mondiale car elle en est devenue non seulement, la locomotive mais en assure la responsabilité et la garantie même de la croissance économique mondiale.

Alors que faire …nous Tunisiens dans ce contexte mondialisé de cette économie globale ..?

  • Allons nous continuer à nous comporter comme nous l’avions fait jusqu’à présent vis à vis de ce géant asiatique, à occulter ses vertus et utiliser des subterfuges politico – Economique qui n’ont plus le droit de citer dans le cadre de cette mondialisation Economique ..pour ne pas envisager une coopération directe et multiforme avec lui ..?
  • Allons nous continuer à regarder cette chine uniquement à travers le miroir déformant des puissants lobbies politico – économiques européens ou Américains …?

Il est clair qu’au jour d’aujourd’hui, nous ne pouvions plus se permettre de maintenir cette attitude, alors que le FMI vient de faire le pas nécessaire il y a un an déjà avec l’intégration du Yuan Chinois dans le panier financier au même titre que le dollars américain ou l’euro.

Nous ne pouvons pas non plus maintenir cette attitude, alors que l’Europe notre partenaire stratégique et qui le demeurera, n’avait pas amélioré de manière substantielle ses subventions à la Tunisie dans le cadre du conseil d’association avec l’UE, alors qu’ils n’ont pas cessé depuis la révolution et après nous avoir affublé d’un prix Nobel de la paix, de nous féliciter pour nos avancées démocratiques, force est de constater que cette aide europeenne depuis sept ans ne correspondait pas à ces prétendus avancées démocratiques qu’ils nous exhibent a chaque occasion.

Mais la Chine est également à la croisée des chemins. Ses défis internes et la promotion de ses investissements extérieurs constituent un challenge que la Chine se doit de relever, et c’est précisément l’initiative du President XI Xinping qui est la réponse la mieux adaptée pour relever ces défis majeurs auxquels elle fait face.

Cette stratégie dénommée OBOR, (one Belt one Road) ou bien la nouvelle route de la soie, a pour objectif majeur de promouvoir une meilleure communication, un meilleur échange, une meilleure compréhension mutuelle entre les peuples d’une part et les opérateurs économiques d’autre part, ce qui est de nature à garantir une coopération durable, efficace et prospère.

Dans cette dynamique, la Région méditerranéenne donne une dimension historique à cette initiative chinoise. N’est-il pas naturel que la renaissance de la route de la soie reprenne le chemin de l’histoire lorsque la Chine Médiévale commerçait déjà avec le monde arabo – musulman et la méditerranée avec un cortège culturel, scientifique et des échanges qui ont marqué l’âge d’or de deux civilisations millénaires, Chinoise et Arabo – musulmane.

Cette approche nouvelle tranche également avec l’engagement unilatéral initié par la Chine il y a un peu plus de 10 ans, selon la formule gagnant-gagnant et la stratégie de non ingérence dans les affaires intérieures des États qui n’a pas permis à la Chine d’engranger partout les succès escomptés.

En Afrique, par exemple, la Chine a rencontré de nombreux obstacles lorsqu’il s’agissait de projets régionaux et a dû faire face au niveau bilatéral, à un environnement des affaires dégradé et à une instabilité politique récurrente.

En ce qui concerne le monde arabe, force est de constater que le Printemps arabe a causé des pertes importantes à la Chine, notamment en Libye, en Syrie et au Yémen.

Cependant en Europe, crise grecque aidant, le géant asiatique a réussi à se positionner de manière presque institutionnelle. Nous avons pu voir récemment l’UE inviter les Chinois à alimenter le plan Juncker, dont le but est de relancer l’économie européenne.

C’est ainsi que des capitaux chinois sont également invités à alimenter le Fonds européen pour les investissements stratégiques.

Mais c’est en Méditerranée que la Chine semble également construire son socle d’intervention en Europe, et en Afrique, notamment à partir de la Grèce et de la Turquie au nord, l’Algérie et  le Maroc au sud.

L’intérêt de Pékin pour la Méditerranée, symbolisé par ces exemples, traduit sa volonté de faire de cette nouvelle «route maritime de la soie» l’axe principal de sa stratégie économique et pourquoi pas, politique dans une région incontournable pour le commerce international.

C’est en cela que des initiatives chinoises en Afrique, à partir de l’Europe et via la Méditerranée, prennent toutes leur sens puisqu’elles semblent converger avec les objectifs chinois dans un espace d’intervention euro-méditerranéen qui pourrait être conçu dans le cadre d’un partenariat avec la Chine.

Ce nouveau deal Afrique-Méditerranée-Europe requiert a mon sens une attention particulière.

Il consacre une approche verticale du développement de l’Europe vers l’Afrique via la Méditerranée et mérite d’être soutenue pour plusieurs raisons:

  • Il trace les contours d’une nouvelle entité géostratégique, démographique, sociale et économique qui s’ajoute aux deux ensembles déjà constitués, l’Asie et les Amériques;
  • Il permet le développement et l’épanouissement d’un continent encore vierge et aux potentialités énormes – l’Afrique – dans le cadre d’un codéveloppement et d’un partenariat clairement institutionnalisés;
  • Il place la région méditerranéenne, dans une première étape, au centre du processus, l’amenant à jouer un rôle central d’interface entre l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique. De marginale en 1990 – malgré le processus de Barcelone initie en 1995 – la Méditerranée redevient centrale;
  • Il conduit les pays subsahariens à se rapprocher de leurs voisins du Nord pour promouvoir une croissance productive, durable et partagée;
  • Il offre à l’Europe la possibilité de regarder de plus près ce qui se passe dans la rive sud de la Méditerranée et de mieux affronter les défis socio-économiques auxquels elle est confrontée chez elle, mais aussi à l’extérieur ( immigration illégale, terrorisme );
  • Il permet enfin à cette rive sud de la Méditerranée qui a connu ces cinq dernières années des soulèvements populaires – lesquels n’ont malheureusement pas tenu leurs promesses sauf en Tunisie – de consolider les processus démocratiques en cours, une fois le pari de la stabilité économique atteint grâce à cette initiative et d’entrevoir enfin un espace démocratique euro-méditerranéen garant de liberté de stabilité politique, de co- développement et davantage de solidarité entre le nord et le sud.

J’ose espérer que la Tunisie, puisse jouer un rôle proéminent et central, dans cette dynamique Chinoise dans la région. La Tunisie est, et doit rester méditerranéenne, terre de culture et creuset des trois civilisations monothéistes, elle se doit de revendiquer haut et fort cette vocation multiculturelle et ethnique.

Géographiquement au cœur de la Méditerranée elle ne peut se soustraire à ses obligations que l’histoire et la géographie lui imposent.

Elle pourrait constituer un partenaire privilégiée à la Chine pour rendre la mare Nostrum un véritable lac de paix de sécurité de prospérité et de co – développement. Il suffit de le vouloir.

C’est l’objectif que je me suis employé d’atteindre dans un cadre non gouvernemental depuis près de trois ans avec mes amis chinois qui ont répondu présent et dont je remercie leur attachement à cette stratégie.

je suis persuadé  que cette initiative va rencontrer l’échos nécessaire auprès des décideurs de mon pays car il y va de l’intérêt de la Tunisie  et qu’elle puisse déboucher sur des opportunités réelles de coopération dont la Tunisie a grandement besoin aujourd’hui, d’autant que ce partenariat que nous souhaitons forger avec nos amis du nord et ceux de l’extrême asiatique n’est qu’un exemple concret d’une coopération solidaire au service d’une mondialisation Economique a visage humain.

Cette commission mixte à venir offre donc une occasion unique pour engager un tel projet ambitieux. Nous devrions à cette occasion montrer a nos amis Chinois qu’on est prêts à être leur partenaires dans la région par des signaux clairs qui doivent être clairement énoncés:

1- Faire savoir à nos amis Chinois qu’on sera leur partenaire privilégié dans l’espace euro – méditerranéen en relevant le niveau de présidence de la commission mixte tuniso -chinoise au niveau des premier ministre des deux pays.

2- Annoncer à cette occasion et sans délai notre adhésion à la stratégie de la route de la soie du président XI Xinping.

3- Parachevez  l’initiative engager par le gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie par la concrétisation et la mise en oeuvre de l’accord signé en décembre 2016 entre les gouverneurs des deux pays, relatif à l’accord de SWAP (Dinars – Reminbi) avec les conséquences que nous pouvons imaginer sur la dette extérieure Tunisienne.

4- Préparer une visite d’Etat en Tunisie ou en Chine qui sera l’occasion de mettre en œuvre toutes les intentions des deux parties.

Tel sera notre objectif pour lequel nous devrions tous œuvrer pour intégrer de manière irrévocable la Tunisie dans la mondialisation Economique et la stratégie internationale du développement et qui permettra de garantir un espoir de vie meilleure à nos jeunes cadres, à nos enfants et nos petits6enfants …!!

Dr Mohamed Sahbi Basly

Ambassadeur de Tunisie

President du conseil de coopération Tuniso – Chinois.

Vice President de la Fondation World Public Diplomacy Organisation (WPDO) pour la région de la Méditerranée.

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